Et la version " un piol plus" racing
Au troquet ou à la pompe à essence, à la vue de la Mach IV (son autre petit nom), il y a toujours un type qui s'avance pour dire que lui ou un de ses amis en a possédé une... Si la H2 attire autant les regards et délie les langues, c'est que dès sa sortie, en 1972, la 750 Kawa devient un mythe. N'allons pas refaire son histoire, lue et relue, mais plutôt résumer à quoi s'attendre de la "bête", bien des années après.
Inauguré sur la 350 quelques mois plus tôt, le dosseret de selle sera repris par tous les Japonais
Le couple du deux-temps !En fait de bestial, le gros deux temps ne surprendra pas le motard d'aujourd'hui par ses accélérations, mais l'étonnera en revanche par son très gros couple à bas régimes pour un moteur 2 temps. Une machine en pleine forme détale avec brio dès les bas régimes. Grâce à son allumage électronique, on peut véritablement conduire la H2 sur le couple entre 3 000 et 5 000 tr/min, y compris en duo. Mais surtout il y a ce bruit inimitable, indescriptible, qui pousse le pilote à tirer les régimes. Un barouf jouissif à l'accélération, en revanche peu plaisant à régime constant. Maintenir une allure stable reste donc plutôt désagréable entre 3 000 et 4 000 tr/min, le moteur se mettant à hoqueter ou au minimum, à "chevroter". Mais c'est au ralenti qu'il inquiète : beaucoup de bruits mécaniques, la transmission primaire et la cloche d'embrayage grincent et ferraillent, les cylindres et les pots font un bruit de grosses casseroles. On dirait que le moulin va casser et pourtant... tout est normal !
Cette H2 est dotée du garde-boue arrière US, et devrait porter un garde-boue avant peint en bleu
Le démarrage s'avère un peu long et impose son cérémonial : mettre quelques secondes le robinet d'essence à dépression sur la position PRI (alimentation directe) si la moto n'a pas tourné depuis plus d'une semaine, replier le repose-pied droit, déplier le kick et donner un coup de pied vif sans laisser le kick partir trop loin, tout en ouvrant la manette du starter située au pouce droit, contre l'accélérateur. Ça part au premier ou au 2ème coup. Particularité, le point mort est tout en bas et la première s'enclenche vers le haut. Une grille mal adaptée à la conduite en ville.
La H2 fume pas mal au démarrage. Si la moto n'est pas gavée en huile, ces fumées s'évanouissent dans les rétros après 2 à 10 km de route (selon l'usage). Les miroirs ne servent qu'à ça : surveiller la densité du brouillard bleuté ; les vibrations permettant éventuellement de distinguer un gyrophare bleu ! Et c'est parti pour une tranche de vie. Le compteur est gradué de 0 à 240 km/h et la zone rouge débute à 7 500 tr/min, régime où le moteur a déjà tout donné. Une H2 accélère moins fort qu'une Z 750 actuelle, il faut le savoir, mais les sensations sont multipliées par mille !
Guidons "cornes de vache" et cale-pieds en avant... c'était pourtant la super sportive de l'époque !
Du bruit et de la fureurDu bruit et de la fureur, c'est ce que vous ressentirez à des vitesses presque raisonnables. Une bonne Kawasaki H2 750 tient le cap jusqu'aux environs des 200 km/h compteur (et même 215 km/h en guidons bracelets). Les deux aiguilles des compteurs jouent souvent les essuie-glaces sur 1 à 2 cm (faute à l'usure ou à des câbles mal passés, ou pas entretenus). Agile mais peu précise, cette 750 2 temps demande un pilotage volontaire et de l'habitude. Elle a tendance à "tomber" sur l'angle à basse vitesse et refuse quelque peu de prendre l'angle sur un freinage un peu appuyé. Avec un seul disque et un étrier mono piston, son freinage n'est ni mordant, ni sûr, loin s'en faut - toujours le garder à l'esprit !
La furie qui se met toute seule sur la roue arrière se révèle être une légende : pour la cabrer, il faut déjà le faire exprès. Les bougies qui claquent à répétition, idem - les carburants ont évolué. Ce qui tient moins de la légende en revanche, c'est son appétit : 9 à 15 litres de SP 95 aux 100 km, auxquels s'ajoutent près de deux litres d'huile 2 temps aux mille bornes... Mais la conso', on s'en fiche un peu. Sauf quand on cherche une pompe sur la réserve : on a 15 à 20 km pour la trouver ! Et même si c'est anecdotique, après une balade sur une H2, vous ne sentirez pas la rose, la "bête" ne brûlant pas tout ce qu'elle avale. Pour en finir avec ses petits désagréments, en ville l'embrayage fatigue le poignet gauche (il existe des kits qui adoucissent la commande), sur route la selle étroite et peu épaisse irrite le postérieur et les vibrations sont pénibles. Mais rares sont ceux qui abattent des bornes au guidon de leur H2. En tout cas pas les "collectionneurs".
Dans le dosseret, bien pratique, on peut loger antivol et le nécessaire pour se dépanner. Sachez-le, une 750 H2 bien réglée et bien suivie se montre très fiable. Aujourd'hui, pour résumer, même si piloter une H2 constitue un réel plaisir, la Mach IV promet plus qu'elle ne donne - la faute à tout ce qu'on a pu lire de mélo sur son compte - et exige un entretien précis. Reste une ligne sublime, un caractère unique, sans oublier une aura qui n'est pas prête de s'éteindre.